« On s’est aimés sans s’en rendre compte. »
« Mon histoire avec Anne a commencé il y a plus de 30 ans. Pas comme un roman d’amour, non. Juste une belle amitié. On s’était connus à l’université, puis la vie avait suivi son cours : chacun avait construit sa famille, ses enfants, ses habitudes. On se voyait de temps en temps. Un café, un repas, des nouvelles échangées entre deux périodes chargées.
Ce n’est qu’après nos 60 ans, une fois nos enfants partis, nos vies devenues un peu plus silencieuses, qu’on s’est retrouvés. Elle venait de perdre son mari, moi j’étais seul depuis longtemps déjà. On s’est rapprochés sans faire de bruit. Je l’appelais souvent pour savoir comment elle allait. Elle m’envoyait des messages pour me raconter ses journées. Et sans qu’on ne le décide vraiment, on a commencé à se voir de plus en plus.
Un jour, je lui ai dit : ‘Tu veux venir passer le week-end à la campagne ?’ Elle a dit oui. C’était simple. Pas de déclaration enflammée, pas de baiser volé. Juste deux vieux amis qui cuisinaient ensemble, riaient, regardaient les étoiles, se taisaient parfois sans malaise. Et puis un soir, elle a posé sa main sur la mienne. Rien d’extraordinaire, mais pour moi, c’était un bouleversement.
Je crois que je l’ai toujours aimée. Mais à notre âge, l’amour n’a plus besoin de prouver qu’il est fort. Il a juste besoin d’exister, tranquillement.
Aujourd’hui, on vit chacun chez soi, mais on partage nos semaines. On ne parle pas de ‘refaire sa vie’, on vit simplement ce qu’il y a à vivre. Ce qui est beau, c’est qu’il n’y a pas eu de grand bouleversement, juste une évidence qui a émergé doucement. Comme si, à la fin d’un long voyage, on avait réalisé qu’on marchait côte à côte depuis le début.
L’amour peut naître sur une base d’amitié ancienne. Il est fait de confiance, d’habitudes partagées, d’une tendresse profonde, sans masque ni illusion. C’est un amour doux, vrai. Et à 66 ans, il n’y a rien de plus précieux. »
